samedi 19 mars 2011

L'enfant modèle

Etant petit j'ai eu la chance de présenter de bonnes dispositions pour satisfaire mes parents.

Mon père s'étant élevé à la seule force de son cerveau dans la société, il a fondé de grands espoirs en moi dès les premiers mois d'école. L'école n'a jamais été pour moi un endroit où l'on se fait des amis, c'était avant tout un endroit où je devais briller par mes notes, le reste passait après.

Dès les classes du cours élémentaire, j'étais soumis à d'intenses séances de devoirs chaque jour, surveillé par ma mère qui avait encore à cette époque toutes ses facultés intellectuelles. J'ai été un enfant obéissant, contrairement à d'autres qui dès que les parents ont le dos tourné s'amusent ou font des bêtises, quand je ne faisais pas mes devoirs c'était pour lire... L'amour que je portais à ma mère n'était que la réflexion de la dévotion qu'elle me vouait. Il n'a jamais pu rien m'arriver étant enfant, à part une malheureuse chute de mon lit à barreaux quand j'étais petit -ayant pour résultat une fracture de la clavicule- le reste de mon enfance était mortellement paisible.

Le seul ami que j'avais à l'époque était mon voisin Romain. Nous jouions par dessus le grillage qui séparait nos deux maisons, tantôt au foot, tantôt au frisbee, mais toujours en étant très calmes. J'ai le souvenir d'être allé une fois chez Romain, mes parents m'avaient autorisés pour sa fête d'anniversaire, ma première mais aussi la seule avant mes 10 ans.

Le souvenir que j'ai de mon père à cette époque est plutôt vaporeux, il s'est installé dans les Ardennes quand j'avais 18 mois, il était donc au tout début de sa carrière de radiologue, fraîchement émancipé de ses parents (il a vécu avec eux jusque son mariage...). Je me souviens de lui rentrant tard, certainement après 19h, je n'avais jamais l'occasion de le voir longtemps avant d'aller me coucher à 20h. Sa présence dans ma mémoire est surtout ponctuée par les corrections que je pouvais recevoir de temps à autre, suite à une rébellion de ma part. J'ai essayé de ne plus être l'enfant modèle. Sans encore le savoir, j'allais y arriver quelques années plus tard...

Peu de temps après l'anniversaire de mes 5 ans, mon frère est né. Bien que je n'ai jamais été jaloux d'une baisse d'attention à mon égard, je n'étais pas le frère modèle au cours de ses premières années.
Pour une obscure raison, les frères et soeurs doivent passer leur temps à se chamailler, c'est écrit dans leurs gènes. Entre nous c'était parfois un jeu, comme lorsque nous nous prenions pour des judokas ou des stars de catch sur le lit de nos parents, parfois c'était plus tragique. 

Une des premières fois où j'ai montré mon égoïsme au monde, c'était à propos d'un sachet de Micho-kos, offert par nos grands parents paternels. Finalement, 2 minutes plus tard, mon frère est allé s'encastrer le crâne sur une arête de mur, que mon père avait trouvé de bon ton de protéger par des coins en métal. Il s'en est tiré avec une dizaine de points de suture je pense. Et je me suis fait gronder comme jamais. A ma décharge, mon frère s'est emmêlé les pieds en marchant à reculons, alors que je défendais mon paquet de bonbons...

J'ai fini par manger mes bonbons seul, comme prévu, mais j'étais puni par mes parents... Mais c'est MON paquet est le seul argument que j'ai pu sortir à l'époque. Je ne me suis jamais excusé pour ça...

Sans ami proche ni cousin/cousines pour découvrir le monde normalement, je commençais ma vie seul, comme un enfant objet, principalement là pour satisfaire ses parents, mais qui ne vivait pas. Ma réussite était le seul mètre étalon de ma valeur dans ce monde, je devais réussir seul et à tout prix.
Mon frère a suivi le même chemin, en étant plus docile, l’aîné avait déjà fait toutes les conneries possibles.

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